Dessinateur virulent à Hara-Kiri, puis à Charlie Hebdo, Pierre Fournier est, comme nombre de ses contemporains, fortement imprégné par l’esprit de Mai 1968. Porté par l’enthousiasme contestataire, il choisit de délaisser peu à peu le dessin pour avertir ses lecteurs de la menace qui pèse sur l’avenir, menace encore largement méconnue :
« Pendant qu’on nous amuse avec des guerres et des révolutions qui s’engendrent les unes les autres en répétant toujours la même chose, l’homme est en train, à force d’exploitation technologique incontrôlée, de rendre la Terre inhabitable, non seulement pour lui, mais pour toutes les formes de vie supérieure qui s’étaient jusqu’alors accommodées de sa présence. »
Dès lors, en polémiste inspiré et en styliste hors pair, il va devenir l’un des précurseurs de l’écologie et le porte-parole hebdomadaire de ce mouvement naissant, tâche qui accaparera tout son temps.
En novembre 1972, il fonde le premier journal écologique français, La Gueule ouverte. À partir de ses articles, il rêve également d’écrire « un ou deux livres » afin d’en proposer une « synthèse philosophique et politique ». Ces livres ne verront jamais le jour ; il ne le sait pas mais, à trente-cinq ans, il lui reste trois mois à vivre.
Cet ouvrage retrace l’aventure personnelle et collective d’un dessinateur corrosif devenu visionnaire, d’un citoyen ordinaire — employé à la Caisse des dépôts et consignations — devenu l’écologiste le plus lu et le plus inspirant de France avant que l’écologie politicienne ne supplante l’écologie révolutionnaire, laquelle semble avoir traversé une grande hibernation, jusqu’à nos jours.